Biancarelli, les orphelins de Dieu
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Être l’instrument du Mal.
Voilà un livre bien mené, dans l’Espace et dans le Temps. On parcourt essentiellement la Corse, malgré des incursions orales en Italie et en Grèce, avec des paysages très présents, abrupts, propices aux embuscades comme aux fuites salvatrices. L’époque, c’est un XIXe turbulent et sanguinaire, qui allie au début la lutte pour l’indépendance contre les Bleus, et le refus de la Conscription.
Mais, comme souvent, les combattants connaissent des dérives, de militants sincères et armés, ils deviennent des mercenaires et des
« Bandits corses », dans des épisodes plus souvent horribles et sanglants que savoureux.
Au départ une affaire de vengeance amène une jeune fille corse à engager un tueur patenté pour châtier des criminels parfaitement odieux. Le Tueur, « l’Infernu », accepte, ce sera sa dernière affaire, et Vénérande obtient de l’accompagner dans sa traque, particulièrement malaisée et périlleuse.
En chemin L’Infernu raconte ce qu’il a vécu, et le récit avance donc sur deux plans : celui des actions passées, et celui du présent, l’acteur devient conteur, Vénérande écoute, parfois critique, séduite et effrayée par les faits rapportés. Puis le conteur devient acteur , et c’est Biancarelli qui prend le relais des scènes haletantes, et des conversations serrées entre les deux protagonistes. L’harmonie est grande entre ces deux narrateurs successifs, Biancarelli adopte le ton de son personnage, jusque dans la gloriole et le cynisme :
« L’Infernu avait agi vite, de manière cruelle, certes, mais somme toute assez généreuse, sans s’attarder sur la découpe, tranchant dans le vif plutôt que cisaillant, et de plus il avait une bonne lame, affûtée à merveille, pas un outil qui accroche ou qui ripe, et à ce moment là c’était tout de même appréciable. »
Ils font de cette histoire un western animé, avec chevaux, justiciers cruels, et crapules sans vergogne, à moins qu’elles n’aient une grandeur dans le Mal.