L'homme de l'ombre est une superbe incursion de Harris dans la politique fiction qui confronte le lecteur à certains des plus grands problèmes politiques de notre époque. Un roman haletant.
"A l'instant où j'ai appris que McAra était mort, j'aurais dû prendre le large. Je le sais maintenant. J'aurais dû dire Désolé, Rick, mais ce n'est pas pour moi. Je ne le sens pas, finir mon verre et partir. Mais il savait si bien raconter les histoires, Rick - j'ai souvent dit qu'il aurait dû être l'écrivain et moi l'agent - qu'une fois qu'il a commencé à parler, il n'était plus question pour moi de ne pas écouter, et le temps qu'il termine, j'étais fichu. Adam Lang a été le Premier ministre britannique qui est resté le plus longtemps en exercice - et a été le plus controversé - de la deuxième moitié du siècle dernier. Et maintenant qu'il a quitté le gouvernement, il a accepté l'un des plus gros à-valoir jamais versés pour rédiger des mémoires complètes (ou presque) de sa vie et de ses années au pouvoir. Alors qu'on le presse de terminer cette oeuvre capitale, Lang engage un nègre pour écrire le livre à sa place. Dès qu'il se met au travail, l'écrivain de l'ombre découvre bien plus de secrets que Lang n'a l'intention d'en révéler, des secrets susceptibles d'altérer la politique mondiale, des secrets susceptibles de tuer."
Mais l'écrivain de l’ombre va découvrir de nombreux secrets peu avouables... Lors de la sortie du livre en octobre 2007, la presse britannique avait fait le lien avec l'ancien Premier ministre Tony Blair. Robert Harris, ancien chroniqueur politique, était un proche de Tony Blair avant d'avoir été déçu par sa politique.
Pour le flegme et l'humour subtilement décalés qui affleurent à chaque épisode, réplique ou commentaire off, puisque cette rocambolesque histoire est racontée par le principal protagoniste en personne : paradoxe et tour de force de l'auteur, son nom n'apparaissant à aucun moment dans le livre.
Un excellent roman qui ne relâche jamais la pression, suspens progressif et personnages très bien campés. Dès l'incipit, on est dans le ton : "Je ne suis pas je : tu n'es pas il ou elle : ils ne sont pas ils." Mais qui est qui, alors ? Réponses au compte-goutte, agrémentées de réflexions et de passages jubilatoires sur le métier de nègre, et même plus globalement sur le livre :
"Les bons livres sont tous différents, alors que les mauvais sont tous exactement pareils. Je le sais avec certitude parce que, dans mon domaine, on lit beaucoup de mauvais livres - des livres tellement mauvais qu'ils ne sont même pas publiés, ce qui est un véritable exploit quand on regarde ce qui est publié !"
Excellent polar, on ne s'ennuie pas en le lisant. Mais je réitère, ce n'est pas un thriller !
_________________
Nous étions une étrave
face à la vague grise
puissante et salée du monde.
Notre neuve impatience
s'est brisée dans le silence hurlant.
Ysandre