La couche d'ozone agit sur la Terre un peu à la manière d'un écran solaire, en permettant de protéger les différentes formes de vie des rayons ultraviolets les plus nocifs (B et C). Si ce rôle sur la vie terrestre est connu de longue date, il n'en va pas de même quant à son impact sur le captage du CO2 par les océans. Ce dernier était jusqu'alors supposé, mais la publication d'une étude, fin juin, vient d'y remédier.
En travaillant sur la zone du 'trou dans la couche d'ozone' (qui est en fait un amincissement de cette dernière), les chercheurs ont mis en évidence que ce 'trou' réduisait l'absorption du carbone atmosphérique par l'océan Austral, et participait à l'augmentation de l'acidité des eaux océaniques des hautes latitudes Sud. Qualifiée de 'significative', cette réduction de l'absorption du CO2 par l'océan Austral n'est pas compensée par les autres zones océaniques de la planète, nombre d'entre-elles montrant aussi des signes de ralentissement du captage. Dans ces conditions, selon les résultats publiés en ligne dans la revue Geophysical Research Letters, de 1987 à 2004 environ 2,3 milliards de tonnes de carbone n'ont pas été séquestrés par les océans, soit une baisse de près de 10 % du rendement du puits de carbone océanique global durant cette période.
Pour les scientifiques, ce phénomène serait dû à la perturbation de la haute atmosphère, par le trou d'ozone, conduisant à un renforcement des vents d'Ouest sur l'océan Austral. Ce surplus de vent, en brassant davantage les eaux de surface avec les plus profondes, riches en CO2, limite le pourvoir de captage de l'océan par une forme de saturation de la couche maritime de surface.
Ces résultats suggèrent que les 'modèles de climat utilisés jusqu'à présent surestiment le puits de carbone océanique et sous-estiment l'acidification des océans'. A ce titre, les scientifiques soulignent l'importance de prendre en compte l'ozone dans les futures modélisations, notamment du GIEC, ce qui permettra de mieux comprendre et d'améliorer les prévisions liées au changement climatique en cours.
La publication de ces résultats devrait avoir une influence non négligeable sur les prochains modèles du GIEC (2), qui, pour l'instant, ne tiennent pas compte des variations d'ozone.
Pascal Farcy
1- Regroupés au sein de l'Institut Pierre-Simon Laplace (IPSL), les trois laboratoires concernés sont : le Laboratoire d'océanographie et du climat : expérimentations et approches numériques (LOCEAN, UPMC/CNRS/MNHN/IRD), le Laboratoire de météorologie dynamique (LMD, UPMC/CNRS/ENS Paris/Ecole Polytechnique) et le Laboratoire des sciences du climat et de l'environnement (LSCE, UVSQ/CNRS/CEA).
2- Groupe intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC).