Michel HOUELLEBECQ

Tu te poses des questions au sujet de la fin du livre?

 C'est ça mon Ysou?

oui ma Sapho dolce, une question au début de mon texte et  une autre concernant la fin. 

[size=34]“Nous voulions changer le monde, mais le monde nous a changés”[/size]
de Ettore Scola

Oui, cela, je le sais et l'ai parfaitement compris, mais je voulais que tu me dises ce que tu pensais de l'idée saugrenue qui m'est passée pas la tête :
ce que j'ai dit au debut 

"Bon ! je suis toujours dans l'expectative .... Houellebecq s'est-il fichu de nous en batissant une histoire très houellebecquienne, avec son style très personnel, ses tics, ses provocations, son langage qui envoie balader le politiquement correct, dont pour ma part j'ai une sainte horreur, ses passages porno "obligatoires", son épouvantable lucidité sur le monde où nous vivons et sur ses contemporains, avec son éternelle désespérance, ses dépressions à rallonge ....  a-t-il fait ça !
En faisant un pastiche de son style reconnaissable avec tout ce qu'il met habituellement autour, a t il voulu nous montrer qu'il pouvait se pasticher lui même ?  a la limite, nous dire qu'il pouvait écrire n'importe quoi, on le lirait quand même ...?" 

Bon, tu ne souhaites pas répondre à mes questions, tant pis pour moi 

Sois patiente, Ysou   , Sapho était très occupée ces temps-ci et puis, elle réfléchit 

Je pense que ce livre n'est pas un pastiche mais un roman où l'on retrouve Houellebecq égal à lui même.C'est un caricaturiste qui développe au fil de ses livres tous les travers et les modes de pensées actuelles.
Il a toujours eu une complaisance pour ce qui est vil, médiocre, nul et cynique .
Je ne crois pas qu'il écrit par "facilité" mais ses ressentis vis-à-vis de la société sont toujours les mêmes!
Gris, parfaitement détaché de ce qui l'entoure, vulnérable, dépressif.
En fait pour moi, ses ressentis envers lui-même et la société sont exprimés tout au long de ses romans.

Et toi mon Ysou, qu'en penses-tu? 

J'ai trouvé une longue critique détaillée et positive de ce livre par quelqu'un qui aime Houellebecq en général et ce livre en particulier. En voici la conclusion qui concerne la fin justement :

Citation :

[...] ce qu’il me semble le plus prégnant dans le texte, ce sont les sentiments nostalgiques de Florent, probable double fictif de l’écrivain comme souvent. Ses plus beaux moments sont sans conteste ceux qu’il a vécus dans un état amoureux. Il ne cesse d’y revenir. Il en éprouve des regrets éternels. Jamais plus l’amour (et l’amitié) n’auront cet attrait qu’offre le temps de la jeunesse et c’est à la recherche du temps passé qu’il sillonne les routes. C’est d’ailleurs le socle du roman, il semble s’être construit à partir de l’inventaire précis de ses rencontres amoureuses. Et puisqu’il ne peut plus y accéder, à ces états extraordinaires, puisque qu’il va devoir affronter à présent la solitude, à quoi bon rester parmi les vivants ? Croit-il… c’est ce que nous aimerions lui répondre, à celui qui nous tutoie de temps à autre, nous autres lecteurs. Il envisage une sortie possible à cette souffrance, celle de la spiritualité. Pour mettre à distance le désenchantement, la cruauté, le mal… Pour « lutter contre l’endurcissement des cœurs ». 
C’est donc sur une note consolatrice que s’achève l’ouvrage, une fois n’est pas coutume… Le seul domaine possible en ce monde qui puisse offrir l’espoir d’un bonheur, c’est l’amour des autres, inconditionnel. Voilà le message du livre !
Omnia vincit amor !

Chantal Lévêque

je vous répondrait un peu plus tard. Merci !

Ma Nic, merci pour cette critique favorable, mais je ne pense pas que le socle de ce roman soit l'amour, même s'il en est beaucoup question. Il fait un inventaire, c'est vrai ! mais des êtres qui l'ont touché, qui lui ont été chers. A travers son narrateur, il parle d'un ami, d'une longue amitié, il est heureux de le revoir mais tout en se rendant compte que lui aussi touche le fond.
Il a fait un autre inventaire, celui des agriculteurs, des gagne-petit, là bas, en Normandie. Il dépeint des vies de misère, des travailleur de la terre qui se suicident par désespoir. Il en profite au passage pour faire "un peu de politique".

La critique favorable de Chantal Levêque, c'est un peu de "l'eau de rose" pour raconter l'histoire de "Sérotonine", oui, Houellebecq est romantique, mais malgré ses regrets, ses beaux souvenirs avec Camille qu'il a laissé bêtement s'en aller, c'est du désespoir pur, qu'il s'agit, c'est d'un bilan totalement négatif juste un peu éclairé à la fin du livre par une petite note d'espoir, l'amour ! Et la où Chantal Levêque se trompe, ce n'est pas de l'amour des autres dont il s'agit, mais de l'amour d'une femme, d'un domaine ! une femme.
Je ne sais pas ce que notre Sapho en pensera, ma Nic, en tous cas, merci ! j'ai bien aimé voir les différentes critiques !

Ysou, et Sapho, si vous avez le temps, vous trouverez l'article intégral de Chantal Lévêque ICI

J'avais déjà lu le texte intégral de Chantal; une approche fouillée de Houellebecq . Je suis d'accord avec la plupart des choses qu'elle écrit mais pas sur tout.

Le sensibilité de chacun nous fait voir l'auteur selon nos propres ressentis mais j'apprécie sa vision !

Merci Nic pour le partage 

" Il y a de la bonté dans ce personnage. Elle ne saute pas aux yeux - bien souvent même, certains de ses propos ou attitudes détestables la masquent entièrement. C’est une des raisons d’ailleurs pour lesquelles j’ai toujours aimé cet écrivain, au-delà de tous ses excès, de ses immorales transgressions, de son spleen permanent."
Chantal Lévêque m'apporte sur un plateau les raisons pour lesquelles j'aime Houellebecq ! depuis le temps que je cherchais pourquoi cet homme me touchait tellement ! 
Merci ma Nic, mais tu ne m'avais donné qu'une parcelle du texte et là, ça change tout ! 
Je n'avais pas lu cette critique, et pourtant, le livre terminé et mon ressenti écrit, j'en ai avalé des couleuvres sur cet auteur ! la presse, la télé, les critiques, les auteursetcritiques en même temps ...., ceux qui le connaissent un peu et font semblant de "bien le connaitre", ceux qui le détestent carrément, ceux qui ... Bref ! j'espère qu'il a toujours Clément ! son bon chien. C'est le meilleur ami que l'on puisse avoir quand on est tellement désespéré. L'idée du suicide est séduisante aussi, cette porte de sortie sans retour.

Faut-il identifier à ce point le personnage à l'auteur ??? Certes, je n'ai pas lu le livre, mais tout de même ce n'est pas, que je sache, une autobiographie, je m'interroge vraiment ! ???

je ne sais pas, je n'arrive pas à les dissocier ! ça m'est arrivé en écrivant mon brouillon embrouillé de compte rendu, ensuite j'ai parlé du livre avec une amie, et je continuais à le faire.
Ne t'énerves pas, il n'y a pas de quoi.

Je ne m'énerve pas   , je suis intriguée   Ce serait intéressant d'avoir le point de vue de l'auteur à ce sujet...

A lire les personnes qui l'encensent ou le descendent en flamme ... il n'y a pas que moi qui prête à Houellebecq les sentiments des personnages qu'il met dans ses livres. Mais peut on écrire un roman y laisser un peu de sa propre personnalité ?

Un peu, probablement, quoique, à mon avis, ce ne soit pas toujours le cas sauf peut-être dans l'écriture. Ce qui me trouble c'est de voir que toi, et d'autres semble-t-il, vous confondiez en une seule et même personne l'auteur et sa création. Cela me rappelle le temps où j'expliquais longuement à mes élèves la différence entre auteur et narrateur.   , y compris en présence d'un "je".

Je suppose que chaque auteur de roman laisse les traces de sa personnalité . Chacun de ses livres exprime ses états d'âme et ses convictions.

Son intelligence provocatrice, ses choix politiques se moquent comme d' une guigne de ce que les médias officiels vont penser d'eux.

Il faut savoir aussi que M.H est un dépressif sévère et soigné comme tel par un médecin de Zurich.

Ma Sapho, il a eu un chien : Clément. Il l'aimait beaucoup et était moins dépressif  pendant cette période. Hélas, Clément est mort et il n'a pas jugé bon d'en rendre un autre heureux ...... et lui, d'aller mieux par la même occasion. Il est quand même devenu membre donateur de 30 millions d'amis, la SPA, je crois aussi, enfin, des associations pour les animaux.

A propos de la chute de la civilisation occidentale.


Parmi les écrivains contemporains, Michel Houellebecq, traduit en russe, est celui qui se rapproche le plus de cette idée de déclin moral et civilisationnel. On ne sait pas si les élites pro-Poutine ont lu l'auteur d'Anéantir, mais elles verront dans son œuvre – sans faire de lui un complice ! – une même représentation des travers occidentaux. Houellebecq : « Si quelqu'un écrit dans cent ans : “Sur l'Occident de la fin du XXe et du début du XXIe siècle, sur le déclin qu'il traversait à l'époque, Houellebecq offre un témoignage d'une grande valeur”, c'est un compliment que j'accepte par avance », a-t-il déclaré lors de la remise du prix Oswald-Spengler en 2018. La question civilisationnelle nous est posée par Houellebecq, mais également quelque part par Poutine : aurions-nous, ces dernières années, cédé au confort matériel, à l'individualisme et à la consommation, tout en reléguant la verticalité, les valeurs morales et le sens commun ? Pour citer Céline, serions-nous désormais « les bras ballants, devant l'événement, les instincts repliés comme un parapluie, branlochants d'incohérence, réduits à [nous]-mêmes, c'est-à-dire à rien » ?


Je viens de lire un article du Point qui m'a fait froid dans le dos.

Il y a de quoi.

Le titre du Point

n'est pas si exagéré que ça. Tout est décrit, tout correspond. Houellebeq est un remarquable observateur qui écrit l'histoire du futur sans, pour autant, mériter le nom de "visionnaire". Mais il possède une belle intelligence analytique et intuitive à la fois.